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ENTRETIEN AVEC RAJENDRA KUMAR PACHAURI (*) A PROPOS DES DEFIS DE L’AFRIQUE FACE AU RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE – FTTH Magazine

ENTRETIEN AVEC RAJENDRA KUMAR PACHAURI (*) A PROPOS DES DEFIS DE L’AFRIQUE FACE AU RECHAUFFEMENT CLIMATIQUE

Pierre Prakash : Comment expliquez-vous la vulnérabilité de l’Afrique aux changements climatiques ?

Rajendra Kumar Pachauri : Le changement climatique ne fait qu’exacerber des situations existantes. L’Afrique est déjà soumise à de nombreuses pressions : la malnutrition et la faim sont très répandues, l’eau manque dans certaines régions, les rendements agricoles sont très bas, il y a des conflits armés et des problèmes de gouvernance. Cette conjoncture crée des conditions où même le plus petit recul du bien-être, la plus petite menace à la stabilité de la région peut avoir des conséquences graves. Avec le changement climatique, ces pressions vont atteindre un point qui risque d’engendrer des situations de crises de diverses natures.

Nous estimons qu’actuellement 250 millions d’Africains manqueront d’eau.

P.P. : L’Afrique a-t-elle des atouts pour combattre le changement climatique ?

R.K.P. : Ses ressources naturelles représentent une grande richesse, qui pourrait être utile pour financer des projets en tout genre. Malheureusement, elles ont souvent été vendues à des prix très bas, et le fait est qu’une bonne partie des recettes générées n’est pas réinvestie pour promouvoir le développement.

P.P. : Le fait d’être exposé à plusieurs facettes du changement climatique ne pourrait-il pas permettre de mieux comprendre et donc de mieux combattre le phénomène ?

R.K. P. : Le problème, c’est le manque d’expertise scientifique. A l’exception peut-être de l’Afrique du Sud, le continent manque cruellement de capacités à modéliser quantitativement et à estimer la nature et l’étendue du changement climatique à venir. Or, sans cette capacité, vous ne pouvez pas non plus prévoir des plans d’adaptation.

P.P. : Pour limiter les conséquences du réchauffement climatique en Afrique, faut-il mieux freiner l’exode de la population vers les villes, ou adapter les villes ?

R.K.P. : Il faut faire les deux. Car face à un afflux massif de population, il y a une limite à l’amélioration des infrastructures urbaines. Parallèlement à l’adaptation des villes, il faut assurer le développement rural, à une échelle massive, pour que les gens n’aillent pas s’entasser dans des bidonvilles géants.

P.P. : Certains contestent l’accent mis sur la lutte contre le réchauffement climatique, et réclament que l’argent investi pour aider le Sud dans ce domaine soit réorienté vers le développement…

R.K.P. : Ce qu’il faut comprendre, c’est que si l’on ne fait rien pour atténuer les émissions, l’impact du changement climatique atteindra un tel niveau que notre capacité d’adaptation sera de très loin dépassée. Nous devons donc nous adapter à ces impacts, et nous efforcer de réduire les émissions au niveau mondial, avec un sens de l’urgence.

P.P. : Souvent, la réduction des émissions et l’adaptation au changement climatique passent par la haute technologie. Comment faire pour que l’Afrique en bénéficie ?

R.K.P. : Je ne vois que deux solutions. D’abord, créer des partenariats entre Nord et Sud qui permettraient des développements conjoints. Mais dans de nombreux pays en développement, l’obstacle est le manque de compétences locales et d’infrastructures nécessaires pour assurer la maintenance de ces technologies. L’autre solution serait de faciliter les transferts de ces technologies, via des prêts à taux réduits, des subventions, ou un fonds constitué par les pays développés. Mais ces technologies ne peuvent pas être simplement parachutées : elles devront être adaptées aux régions d’accueil. Or, les gens du Nord ne comprennent pas toujours l’environnement social et culturel dans lequel elles sont utilisées. Et le Sud manque, lui, de compétences techniques ; des technologies larguées sans suivi ne seront souvent pas utilisées de manière optimale. Les technologies doivent donc être transférées « customisées » pour des conditions locales bien spécifiques, ce qui ne peut se faire qu’avec la participation des communautés. C’est un vrai défi.

(*) RAJENDRA KUMAR PACHAURI EX PRESIDENT DU GROUPE D’EXPERTS INTERGOUVERNEMENTAL SUR L’ÉVOLUTION DU CLIMAT (GIEC). Propos recueillis par Pierre Prakash de Science & Vie

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