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Des vacances revanchardes – FTTH Magazine

Des vacances revanchardes

Par Ata-Ilah Khaouja

De quoi s’agit-il ?

A peine sorti de deux années de confinement, on s’est précipité, comme on ne l’a jamais fait, sur tout ce qui est source de distraction, de détente et de loisir. On s’est jeté sur les transports, voyages, expéditions et excursions comme l’auraient fait des affamés sur des repas ou des assoiffés sur de l’eau. On s’est pressé de le faire pour tourner une page, encore saignante, une fois pour toutes malgré les propos inquiétant et alarmistes de certains pessimistes.

Une revanche généralisée.

On dirait le jour d’après… suite à un volcan, à un déluge ou à un tremblement de terre. Au milieu de gares routières devenues de véritables lieux de rassemblements ou de pèlerinages, dans des aérogares complètement saturés de monde, dans des aéroports totalement saturés, dans des ports à bord de leur capacité d’accueil, et, comme embarquées dans une course contre la montre et pressées de vivre quelque chose d’exceptionnel pour une dernière fois, des foules agglutinées attendent d’être transportées ailleurs.

Au milieu de ces foules et de ces espaces on contemple encore, ici et là, des ruines d’une autre nature qui datent, pourtant, d’à peine deux ans, donc toutes récentes mais qui donnent l’image d’une humanité rescapée et l’impression d’un monde miraculé qui aurait survécu à un passé épais et très lointain ou à une catastrophe globale et foudroyante.

Au milieu, donc, de peuplades de toutes nationalités, le long de tous les quais et de toutes les voies d’embarcation on peut lire encore sur des pancartes énormes les stigmates du tsunami viral : passe vaccinal inévitable, port du masque obligatoire, respect nécessaire de la distanciation de sécurité… des affiches géantes prévenant les troupes de la circulation toujours présente et actuelle du virus et s’adressant à des bataillons dont la seule préoccupation est de changer d’air et de vivre d’autres échappées. On s’affaire, on s’agite et on se montre empressé pour se dérober aux différents rappels sur pancartes, sur écrans et sur affiches… On voudrait, coûte que coûte, se soustraire à tout ce qui rappelle la triste époque, on aimerait se préserver de cette épouvante que les journaux télévisés ne cessent de faire revivre en déroulant la comptabilité funeste du nombre des victimes, pourtant toujours en baisse verticale localement et au niveau de la planète : on détourne les regards pour tourner la page !

Au milieu de ce brouhaha, toujours, et malgré quelques stigmates d’un  décor triste et lugubre, on ne rate aucune photo et on se prend en selfie comme si rien n’était ou comme si jamais virus n’a existé : depuis la copie d’écran de la confirmation de la réservation tant attendue et enfin obtenue, en passant par le selfie devant l’embarquement aérien, portuaire ou ferroviaire… la rafle des flashs n’épargne aucun moment du départ ni celui de l’arrivée.  Sont scrutés dans les moindres détails tous les instants de l’évasion que les smartphones aident à immortaliser sur le champ : enfin la tant attendue délivrance !

Et plus les appels à la prudence sanitaire sont récurrents et  imprégnants, plus la rage de les oublier est forte. Plus les traces des recommandations à la précaution sont visibles et présentes, plus l’engouement à l’évasion et à la fuite est incompressible. En même temps, la fureur de respirer l’air frais d’ailleurs et la fièvre de s’évader sont impérieuses ; l’appétit pour passer des vacances ‘insouciantes’ est envahissant ; l’emballement pour vivre des passions inconscientes et imprudentes est violement vif : personne ne peut arrêter cette soif, cet appétit, cette avidité de prendre une revanche sur trois années gravement critiques. Tout le monde souhaite éradiquer les cicatrices d’un virus et les souillures d’une souffrance

Une fois libérés, les heureux voyageurs se sont mis en route avec cette idée qu’une poignée de jours est devant eux et qu’il faut en profiter au maximum et tout de suite, pour effacer le cauchemar d’une ère triste où les déplacements étaient rationnés…

Bref, on est parti avec cette idée de revanche, cette idée de faire payer à un virus inaccessible la victoire du vainqueur. On est parti en vacances animé d’un esprit de vengeance et habité par un désir de représailles. A-t-on réussi ?

Le grand exode ou des murs à double histoire !

Depuis trois ans, c’est la première fois où on s’est laissé entraîner en grand nombre par des expéditions vers des horizons lointaines et des latitudes hautes, reprenant ainsi les habitudes d’avant la pandémie. On a visité forêts et campagnes, plages et montagnes et on s’est précipité avec force vers châteaux et musées, tours et forteresses, citadelles et  bastille ; on s’y est hâté pour visiter tout ce qui peut être admiré et contemplé avec cette sensation bien particulière que cela serait, peut-être, pour la dernière fois ou que bientôt tout accès y serait, à nouveau, règlementé ou encore interdit pour un temps.

On a admiré minutieusement des monuments historiques, immémoriaux ou récents, et on s’est arrêté devant des châteaux, millénaires ou modernes, pour contempler des murs à plusieurs couches comme le sont les anciens parchemins : une succession de lignes historiques.

On y a lu, comme anciennement, les passages d’empires évanouis ou de dynasties disparues, des traces de construction ou de restauration attribuées à telle puissance ou à telle couronne.

Cette année, sur de tels murs, en plus du passé vertigineux et épais, les époques historiques disparues ont côtoyé notre vécu d’aujourd’hui ; des hiéroglyphes immémoriaux ont coudoyé des messages fraichement imprimés et des annonces vite périmées et rapidement dépassées. Sur le mur d’un édifice datant du troisième siècle, un écriteau, collé il y a une seconde, c’est-à-dire en 2020, mais brusquement déjà désuet, marquait comiquement le contraste : « le passe sanitaire et le test PCR sont nécessaires » pour explorer la vue et apprécier l’histoire. Ecriteau dont tous les visiteurs se moquaient éperdument. Juste à côté, à l’entrée toujours, des recommandations à respecter la distanciation physique que personne n’observe…

Ce décalage prouve que pour accéder à l’histoire ancienne et l’apprécier, l’histoire récente doit s’effacer et céder sa place. Autrement dit, pour savourer les vestiges des temps passés, les instants présents doivent s’évanouir exactement comme s’effacent les lignes superficielles des couches supérieures d’un parchemin pour permettre l’accès à ce qui est ancien et le déchiffrer et le décoder.

Pour finir : entre pessimistes et optimistes.

Avant même le début des vacances alors que les préparatifs étaient à leur comble, des pessimistes s’alarmaient et décrivaient ce qu’allait être la reprise de septembre : des hôpitaux complètement débordés, des urgences asphyxiées… Malgré des chiffres rassurant des baisses de cas et presque d’absence de victimes de la covid, ces alarmistes ne cessaient de s’imaginer des services excédés ou des couloirs débordés. Face à eux, des revanchards qui ne pensaient et ne pensent qu’à se venger d’un virus qui les a bloqués durant trois ans. Des revanchards et des optimistes qui pensaient et qui pensent que si l’époque virale s’est bien terminée, la saveur de l’instant est très précieuse et qu’il faut donc en profiter. D’autant plus que nous ne serions pas à l’abri d’un éventuel et probable retour aux rationnements des déplacements. Des rationnements pour des raisons géopolitiques, cette fois-ci, seraient toujours à craindre. En effet, des conflits déjà entamés pourraient mettre en péril par exemple l’acheminement des ressources pétrolières ou gazières… ce qui imposerait au niveau mondial ce qui se prévoit  déjà : la sobriété énergétique locale de certains pays européens. On y reviendra.

Par Ata-Ilah Khaouja

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